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d'ailleurs

Voyager sans savoir où l’on va, se laisser surprendre

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Mon hôte me demande si j’ai déjà dressé une liste des choses que j’aimerais découvrir à Newcastle. Je suis confuse… Jusqu’à hier je savais à peine qu’elle était bien plus au nord de Londres.

C’est dire si mes considérations touristiques (sans parler des préoccupations géographiques et météorologiques) sont d’une quelconque ampleur… Ah mais non, je ne suis pas encore blasée, je vous l’assure! C’est juste que je ne voyage pas comme ça.

À la manière de mes ancêtres romains, je pratique un veni vidi vici convaincu. Je la transformerais d’ailleurs bien en veni vidi edi (je suis venue, j’ai vu, j’ai mangé). En gros, je ne sais pas où je vais, mais j’y vais. Et j’y mange!

Restaurant Town Hall, à Newcastle

Les saucisses aux poireaux du Town Hall, à Newcastle

Un jour quelqu’un m’a lancé d’un regard consterné « Quoi? Mais tu ne fais pas de recherche avant de te rendre dans un endroit inconnu? » comme si j’étais la chose la plus mal vivante de la planète. Non très cher, la vie est trop courte pour les recherches! Sans parler de ma mémoire qui souvent me fait parfois défaut… Si c’est pour travailler et puis tout oublier…

Les ponts de Newcastle

Les ponts de Newcastle

Mais je m’égare. Je voyage comme ça par choix, parce que c’est ce qui me fait vibrer, d’entrer dans l’inconnu. Ah, l’inconnu.

Je survole, pour la millième fois sans doute, une marée de nuages cotonneux et ensoleillés. J’y suis à nouveau! Mon amant favori est l’Inconnu: il me suit partout, me comble de surprises, ne lâche jamais ma main, tant que je ne lâche pas la sienne.
Mais je l’ai mérité Mesdames et Messieurs, oui, vraiment! C’est un amour qui se cultive et se chérit, pas de ceux qui vous tombent dans les bras déjà pâmés!
C’est un amoureux honnête qui ne laisse apparaître que la réalité, aussi extasiante ou morose qu’elle puisse être.
C’est un amoureux qui me rappelle tous les jours qu’il y a de la beauté et du sens dans tout.
C’est un amoureux généreux qui ne se fait jamais attendre, pour peu qu’on lui laisse la place la plus importante dans notre vie.
Oh, je continuerai d’embrasser l’Inconnu, à plein corps, à plein coeur!

Zut, je me suis vraiment égarée (mais non, Messieurs, je ne suis pas une de ces viles voyageuses sans coeur qui n’a pas besoin de vous, bien au contraire).

Donc je disais. Je voyage comme ça par choix, oui. Parce que ça me fait vibrer de ne pas savoir où je mets mes pieds, déflorer un terrain sur lequel je n’ai pu projeter que mes illusions fantastiques (et les détruire avec autant de brio), la mémoire vierge de tous les clichés pré-mâchés que vous servent les guides et Google Images (et puis comme ça, quand je prends des photos, j’ai l’impression d’être une exploratrice, et pas juste la millième touriste à prendre en photo ce pont sous cet angle là, même si… mais non, la vie est trop courte pour les inutiles désillusions)…

C’est aussi plus humain. Ils faisaient comment les gens quand il n’y avait pas de guide? Je vous le donne en mille: ils communiquaient.
– Messire, m’indiqueriez-vous l’auberge la plus proche?
– Bien entendu gente Demoiselle, permettez-moi donc de vous y escorter!
– Grand merci, Messire, mais voyez-vous, je suis une Jeanne d’Arc des temps modernes et je vais me débrouiller!

Newcastle

Mais qu’elle est belle, cette Newcastle!

Bon, j’avoue… Dès mon arrivée je me rue au magasin de téléphonie du coin et je m’achète un plan data. Comme ça je peux utiliser Foursquare, Twitter et instagrammer à foison.
Aïe aïe, l’image de la voyageuse en mode authentique en prend un coup hein? Bof, non. Je mange dans les meilleurs restaurants de la ville, j’accours là où ça buzze, je ne manque pas un événement, ni une potentielle rencontre. Les ondes G sont mon sixième sens, et je ne vois pas pourquoi je m’en passerais. Chacun son truc!

Bref, je me suis perdue à Newcastle.
Non, mais non, je ne me suis pas vraiment perdue.
J’ai tracé toute la ville dans une trajectoire parfaite, le sourire collé aux lèvres comme une gamine de 6 ans qui entre dans un magasin de bonbons.
Et c’est tout ce qui compte.

Mes bonnes adresses à Newcastle

Je sais, je sais, si vous aussi êtes comme moi, vous n’avez pas besoin de ça. Mais je vous les dépose là et vous en faites ce que vous voulez, de mes excellentissimes adresses à Newcastle ;)

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Par Corinne Stoppelli

Je suis Corinne, un petit oiseau libre. Sans domicile fixe depuis 2010, je sillonne la planète à la recherche d'inspiration et de points de vue différents. Sur Vie Nomade, je partage mon regard sur le monde, le temps et le changement, d'une plume sincère et d'un objectif curieux et ouvert. En savoir plus?

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(21 commentaires)

  1. Chacun son truc, en effet :D J’avoue que tout lâcher comme ça, ça ne me convient pas. J’ai pas envie de passer à quelque chose que j’aurais adoré si j’avais été informé :) Mon compagnon est plus comme toi, du coup on coupe la poire en deux lors de nos périples : chaque jour je prévois deux-trois escapades que j’ai choisi (sur lesquelles je me suis renseignée en demandant à des gens, lisant des blogs ou des guides de voyages) et le reste, ce sont ses pieds qui décident !

    • J’exagère un peu bien sûr! Il m’arrive de feuilleter, browser, fouiller, demander aux amis, ça dépend des destinations! Ne suis pas une extrémiste du sans-guide :p Mais j’aime par-dessus tout ces moments de surprise où les pieds décident, comme tu dis!

  2. Je vais découvrir le voyage sans guide d’ici quelques jours puisque j’ai décidé de traverser le Paraguay pour rejoindre Iguazu puis Buenos Aires, tout ça sans avoir pu dénicher de guides ici, en Bolivie! D’habitude, j’adore décortiquer mon LP pour me faire une idée assez précise de ce que je vais découvrir, de la culture, de la bouffe… Parfois, cela m’a semblé indispensable (en Inde par exemple, afin de ne pas faire d’impairs ou bien en Colombie, pour ne pas mettre les pieds dans un guêpier) mais d’autres fois c’est vrai, j’aurais pu m’en passer. Je partage ton article car je ne doute pas de sa qualité comme d’habitude, mais n’ai malheureusement pas pu y accéder ici…

  3. Merci En Terre Andine! Loin de moins l’idée de mépriser l’utilisation d’un guide (ou toute autre manière de découvrir)! C’est plutôt une justification du pourquoi je ne sais jamais rien sur rien :p Magnifique! Je t’envie, l’Amérique du Sud un vieux rêve pas encore réalisé!

  4. Ça me stresse moi de pas savoir où je mets les pieds, mais plutôt par peur de rater des choses en fait, de ne pas profiter pleinement. Ça m’est arrivé lors de mon week end à Édimbourg, comme j’ai su que y allais seulement la veille du départ, j’avais rien fouillé du tout, j’avais juste mon guide du routard dans le sac à consulter sur le tas. Et finalement, ce fut un enchantement dont j’ai bien profité, même si j’ai quand même raté des trucs importants :P Partant (trop) rarement et jamais longtemps, il me faut un peu préparer le truc sinon je ne profiterais sans doute pas de grand chose, mais un mix de préparation et d’improvisation c’est l’idéal, et en général, une fois que j’ai vu et fait ce que j’ai prévu, ça part en free style :D Profite bien de Newcastle ! :*

    • Ouais, c’est clair que partir pas souvent et pour une courte durée change la donne: on a envie d’en tirer le maximum. Des fois j’ai envie de le faire mais je n’y arrive simplement pas, je ne trouve ni le temps, ni l’énergie, puisque je ne fais que ça.
      Je me souviens de ma visite à New York, que j’attendais depuis des décennies, y’avait 2 trucs que je voulais vraiment voir: le flatiron et la 5th Avenue. Je me baladais pas loin de Broadway et tout d’un coup je vois une vitrine intrigante, toute serrée… Je lève les yeux et… OMG le flatiron! OMG OMG! J’aurais pu danser de joie autour.

  5. Chrissand dit :

    Quand je voyage j’aime organiser toutes mes visites afin de ne rien rater ou pour obtenir les meilleurs prix. Cependant quelques destinations se pretent bien à ce que tu décris : Se perdre dans la ville et se laisser porter au fil de nos envies.

    Après c’est au risque de se dire qu’on est passé à coté de choses sympa….

  6. Excellent ton texte Corinne !
    J’adore le ton…

    Je me sens un peu schizophrène ces temps-ci : j’aime aussi n’avoir aucune image en tête avant d’aller quelque part, et en même temps j’adore les guides (de bonne qualité, ils ne sont pas tous égaux), et j’aime même les écrire.
    Chacun son truc plus que jamais (par exemple, j’aime bien vraiment déconnecter en voyage, même si c’est de plus en plus rare!).
    Et dans la même veine: il n’y a pas une seule manière de voyager, mais bien autant que d’individus finalement :)

  7. Julien dit :

    J’ai pour ma part beaucoup de mal à partir sans me renseigner sur la destination. Je dirais même que j’en ai besoin. ça me permet de m’imprégner tout doucement du pays ou de la ville et lorsque j’arrive sur place, je me sens bien tout de suite

    • Tu me fais penser qu’il y a des choses que je regarde, parfois, ce sont les us/coutumes si c’est un lieu que je ne connais pas. À quoi faut-il faire attention quand on communique, politesse, pourboires, etc.

  8. Maïder dit :

    Je suis comme toi, je ne prépare que très peu mes voyages mais je suis toujours preneuse pour de bonnes adresses culinaires ;)
    J’aurais l’impression de me foutre la pression et continuer à garder le contrôle à trop préparer alors que je recherche exactement l’inverse lorsque je voyage.

    ps : merci pour le clin d’oeil boring girl !

    • Oui, moi aussi, toujours pour les bonnes adresses culinaires! Bon ça dépend de qui me les donne ;) Mais J’utilise surtout Foursquare pour ça, j’ai trouvé de ces perles grâce à cette app!

  9. swann dit :

    Très joli texte, j’ai adoré le lire !
    Je suis un peu comme toi, je n’aime pas les voyages trop organisés, trop planifié, j’aime être surprise par ce que je vais découvrir et me laisser guider, ne pas être pressée par un itinéraire déjà tracé.
    Bien sur, il y a toujours l’appréhension d’être passée à coté de quelque chose, mais lorsque cela arrive, je me dit que ça feras une bonne excuse pour y retourner ! ^^

  10. Viedevoyages dit :

    Bonsoir Corinne,
    Cela fait un moment que je butine sur ton site, que je me laisse inspirer et voilà le pas est franchi, je suis devenue une nomade moi aussi… Cet article me parle de nouveau. J’aime voyager au gré de mes pas. Mais mon esprit rationnel et logique voudrait bien pouvoir tout prévoir. Et préparer un voyage, c’est déjà voyager aussi … Gros dilemme, non ? Finalement, plus je voyage et moins j’ai le temps et l’envie de tout préparer. Alors je projette les grandes lignes (quand, les incontournables) et après je laisse mes pieds me guider. Et je ne veux plus regarder les photos en avance, parfois juste des recommandations de petits restaux !

    • Hello Viedevoyage, et bravo pour ta nouvelle vie! Tu vas voyager tout le temps, alors tu n’auras plus besoin de préparer pour te sentir en voyage = plus de dilemme :D Blague à part, non, je n’y vois pas de dilemme: à mon sens faut juste faire comme on le sent, quand on le sent. J’organise parfois des trips à l’heure près, et ça fonctionne.

  11. Sirhom dit :

    Salut Corinne,
    je te suis assez complètement, je préfère laisser les recherches à un moment ultérieur. Pour enrichir les reminiscences.

    Cela dit ma tactique perso, c’est celle du hasard orienté. En voyage, le matin, je choisis un point éloigné sur la carte. Le plan s’est d’y arriver à pied, le plus tard possible, afin de rencontrer cent autres choses en chemin.
    Du coup, je préfère rester plusieurs jours dans le même coin, pour multiplier les chances et les gains:)

    • C’est pas mal comme tactique. Je fais souvent pareil mais jusqu’ici c’était inconsciemment ;) Je me balade entre quartiers éloignés à pied généralement et je m’arrête partout ou quelque chose m’interpelle.

  12. Charly dit :

    Tiens, cela me rappelle une chanson que j’écoutais il y a quelques années dejà…
    « Je ne sais pas où je vais, ça je ne l’ai jamais bien su,
    Mais si jamais je le savais, je crois bien que je n’irais plus. »
    Découvrir le monde là où tes pas te guide, il n’y a rien de plus beau.

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