Histoires
d'ailleurs

L’éducation berlinoise

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Je vous écris de l’un des nombreux cafés enfumés de Berlin. Je ne sais pas par quel miracle j’ai réussi à y trouver une petite table rien que pour moi. La musique jazzy en arrière-plan est recouverte par les discussions, les rires et les tapotements des doigts sur les innombrables claviers. Les serveurs oeuvrent en silence, c’est un autre jour dans leur quotidien.

De ces trois mois à Berlin j’aurai tiré de nombreux plaisirs et enseignements. Comme de retrouver une tranche d’un chaos qui me manquait, celui de la grande ville, effrénée, où chacun vaque à ses aspirations et puis revient se reposer dans le calme de sa chambrette, dans un appartement anonyme sur l’une des longues allées, à des heures plus ou moins catholiques.

Patiner sur la Spree à Berlin, en hiver

La Spree se transforme en patinoire géante au plus froid de l’hiver. On sort les patins à glace, on y descend à pied, en poussette, en luge ou même avec son chien.

J’y ai trouvé beaucoup de gentillesse, de nombreux sourires, des gens aimables et plaisants. J’y ai apprécié une grande tolérance, une liberté dans les choix de vie, un environnement parfait pour ceux dont l’âme d’artiste un peu torturée sont sur l’avant de la scène. Berlin est une ville qui travaille beaucoup mais qui gagne peu et s’il y a un lieu au monde qui me ressemble le plus, ce doit être elle. Ses travers et ses lignes droites, son bruit assourdissant et ses voix en sourdine, sa musique enjouée et son humble discrétion.

Malheureusement il est déjà l’heure pour moi de la quitter. Je sais, j’avais pris la décision de me poser afin de me retrouver et d’entreprendre peut-être de plus grands projets. Mais Berlin, à mes yeux si douce, a ses côtés impitoyables. J’y avais trouvé un agréable refuge en la compagnie de Natascha, mon amie artiste, mais nos rythmes (ou plutôt, mon absence de rythme?) semblent être incompatibles. Dans cet immense entrelacs de vies humaines, la constante de la routine semble prendre le dessus, comme s’il s’agissait d’un fil d’ariane qui raccroche les gens à l’existence. Et moi, acrobate sans mousquetons, je suis recalée.

Molecule Man, sculpture à Berlin

La sculpture « Molecule Man » vue depuis l’Elsenbrücke

Difficile ici de retrouver un si bel endroit de vie. Ma chambre dans le nord de Neukölln, à deux pas du canal de Maybachufer, va indéniablement me manquer. Pour retrouver un cocon similaire, il me faudrait probablement allonger une centaine d’euros de plus par mois. Après deux ans passés à vivoter chez la famille, l’ex petit-ami, les amis en raison d’un absence substantielle de fonds (entre les deux, trois, quatre, cent escapades qui font de ma vie des montagnes russes), je remontais à peine la pente. Encore fragile (de l’esprit comme du porte-monnaie), il a fallu donc rapidement trouver une autre solution.

En termes de loyers équivalents en Europe, j’avais le choix entre le Portugal, le sud de l’Espagne et de nombreux pays de l’Europe de l’est. Ayant besoin d’un minimum de repères culturels en ce moment pour combattre la fatigue qui pèse encore derrière le burn-out, j’ai donc choisi le sud de l’Espagne… Que je ne connais pas du tout! Mais qui m’offre de ravissantes perspectives.

La Fernsehturm de Berlin

La Fernsehturm de Berlin, vue de la terrasse du Wombat Hostel

Le mois prochain, je mets donc le cap pour Malaga, en Andalousie. C’est une région que j’ai toujours rêvé de découvrir et je ne vais pas m’y ennuyer. Un peu de montagne, beaucoup de mer, je vais en profiter pour remettre en forme ce corps qui porte tous mes plus grands tracas et ma série de petites joies. Je vais me rapprocher de Gibraltar comme s’il s’agissait d’un signe, d’un destin. Un jour je franchirai ces portes sur un voilier: cap vers l’océan, vers les îles, vers le bonheur de n’avancer qu’avec le vent.

À un de ces jours, Berlin!

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Offrir un café à Corinne sur Ko-fi

Par Corinne Stoppelli

Je suis Corinne, un petit oiseau libre. Sans domicile fixe depuis 2010, je sillonne la planète à la recherche d'inspiration et de points de vue différents. Sur Vie Nomade, je partage mon regard sur le monde, le temps et le changement, d'une plume sincère et d'un objectif curieux et ouvert. En savoir plus?

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(9 commentaires)

  1. Lucie dit :

    Oh c’est génial ! Je reviens d’un mois à Malaga en Décembre et j’ai adoré l’Andalousie ! J’ai écrit un article sur mon blog dessus d’ailleurs avec les choses à faire dans les environs.

    J’ai adoré la liberté et la jeunesse berlinoise aussi. Dans le Sud de l’espagne, il y a un tout petit peu plus de soleil, un vrai bonheur. ;)

  2. Béatrice dit :

    Quel beau rebond ! La magnifique Andalousie vous consolera de Berlin l’enchanteresse qui n’a pas tenu ses promesses. Si proche du nord du Maroc, vous vous glisserez peut-être jusqu’à Tanger et les villes blanches et bleues de cette région qui sont sont comme le reflet par delà la Méditerranée de leurs cousines andalouses. Une seule réserve : l’homme espagnol ne s’est pas encore tout à fait départi de sa superbe machiste…bon voyage et bonne installation

    • Corinne dit :

      Merci Béatrice, vous me faites rêver (les villes blanches et bleues) et sourire à la fois (ah, les hommes!). J’ai déjà projeté mon esprit au-delà de toutes les frontières de l’endroit <3 ... ce qui ne colle pas trop avec mon besoin de repos, mais je vais déjà beaucoup mieux et j'aurai peut-être l'énergie d'aller enfin gambader, flotter, grimper autant que mon coeur le désire! Je croise les doigts et vous souhaite une très belle fin de semaine!

    • Sophie Marette dit :

      Oui Béatrice, mais il y a beaucoup de Britanniques à Malaga. J’habite à Londres depuis 20 ans et les vols pour Malaga sont très chers de Londres (comparés à Almeria ou Murcia) car la demande est énorme de Londres. Alors, darling, tu pourras tenter les hommes de l’Europe entière à Malaga, d’ailleurs, je voudrais bien des retours, ah ah!!

  3. Laurent dit :

    Et bien je te souhaite un beau séjour Andalou Corinne :-) Ne voulant pas endosser le rôle de celui qui met la pression (non non, surtout pas), je n’ose demander, mais où en sont les nouvelles ? Se remplissent-elles de mots ?

    • Corinne dit :

      Merci Laurent! Hélas, la mauvaise nouvelle de mon départ m’a coupé net. J’avais pris la résolution de m’arrêter ici afin d’accéder à la tranquillité qui me permettrait d’avancer. Mais là, un déménagement, d’autres investissements, repartir à la chasse aux projets, aux logements. Si j’avais eu quelques fonds de côté, j’aurais simplement cherché quelque chose d’autre ici et continué, mais là… Quand enfin je décide de m’accorder un peu de paix, c’est le monde qui me ramène à ma nature nomade avec bien peu d’élégance :D

  4. Sophie Marette dit :

    Quel bon choix d’aller vers Malaga! Je ne la connais que très peu, mais j’y ai par deux fois passée une après-midi ou une journée avant de repartir à Londres, après mes retraites de yoga à Periana, dans la montagne, à 1h ou 1.30 de Malaga. J’ai beaucoup aimé cette ambiance chaude et européenne, la plage, sa taille humaine (j’ai trouvé). Cette année, je vais découvrir Almeria et sa campagne.